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©Elise Dottrens
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©Elise Dottrens

Un service facilite les déplacements

Reportage
Un livre revient sur l’histoire de l’association des Amies de la jeune fille, mouvement d’origine protestante né en 1886 qui continue de fournir un précieux service de soutien aux voyageurs en gare.

Pendulaires, vacanciers, familles: peu importe le moment de la journée, la gare de Genève-Cornavinne désemplit pas. Et entre les différents halls, les trois étages et les divers accès aux quais, même les personnes aguerries peuvent peiner à s’y retrouver.

Heureusement, deux «aides en gare» arpentent les lieux, repérables à leurs gilets orange. En quelques minutes, un grand nombre de voyageurs les arrêtent pour leur demander assistance. 

Muer pour s’adapter
Des aides en gare, il y en a également à Bâle, Berne, Bienne, Chiasso, Lucerne, Olten et Zurich. SOS Aide en Gare fait partie d’une série d’associations locales et de terrain chapeautées par Compagna, anciennement Amies de la jeune fille, une histoire de cent quarante ans racontée dans un ouvrage tout juste paru (lire l’encadré). 

C’est avec le soutien des Églises protestantes que la toute jeune association poursuivait alors son but: soutenir et accompagner les femmes qui quittaient les campagnes pour venir travailler en ville, tout en leur inculquant les valeurs tirées de l’Evangile. «Souvent, elles étaient très seules, sans aucun soutien familial», raconte Jeanne Pestalozzi, présidente de Compagna Suisse. Les «Amies» cherchent alors à les protéger de la débauche et du vagabondage. On craint la prostitution et les abus sexuels. «Les membres de l’association les recevaient à la gare et les dirigeaient vers leurs bureaux de conseil, de placement ou leurs pensions.» 

Petit à petit, les Amies de la jeune fille ont adapté leurs offres aux besoins d’autres publics, un glissement illustré par le changement de nom en 1999, par lequel elles sont devenues Compagna. Aujourd’hui, ce sont surtout les personnes en situation de handicap et les seniors qui sollicitent leurs services.

Fées des stations
Pour s’adapter au mieux aux changements sociétaux, Compagna et ses différentes structures ont connu de multiples restructurations, changements de nom et passages de témoin, culminant avec la prochaine dissolution de Compagna Suisse. L’organisation Gare et Mobilité SA gérera, dès 2026, l’important volet du contrat de partenariat financier avec les CFF, seul aspect reliant encore toute la famille d’associations SOS Aide en Gare.

Ce service sera-t-il nécessaire encore longtemps, la technologie prenant petit à petit le pas sur une aide physique? Jeanne Pestalozzi n’a aucun doute. «Oui, cela évolue fortement et c’est positif! Mais la population vieillit. Cela ne signifie absolument pas être handicapé, néanmoins cela engendre souvent un besoin de soutien pour se déplacer en gare. Et puis, la technique ne résout pas tout! Je pense en particulier aux lignes blanches qui guident les personnes aveugles ou malvoyantes. Dès qu’il y a un chantier, elles deviennent caduques et personne n’est là pour expliquer le chemin.»

«La Femme à la valise»
Dans cet ouvrage traduit de l’allemand, avec photos, anciennes publicités et témoignages à l’appui, trois historiennes livrent un récit chronologique complet de la vie de l’association et de ses différentes oeuvres encore actives (aides en gare, foyers d’accueil pour femmes, etc.). On en apprend davantage sur les enjeux moraux, religieux et financiers qui ont fait de Compagna la digne mais moderne héritière des Amies de la jeune fille. Si les valeurs chrétiennes, et plus précisément protestantes, sont moins présentes aujourd’hui dans les priorités de l’association, celles de solidarité, d’inclusivité et de générosité constituent un fil rouge.

La Femme à la valise. Les Amies de la jeune fille en Suisse, Esther Hürlimann,Ursina Largiadèr et Luzia Schoeck, Editions Alphil, 2025, 236 p.